— Ce texte a été précédemment publié dans le magazine Embuild de novembre 2022 —
Au sein de plusieurs de ses filiales, Eiffage Benelux a recours à un logiciel qui utilise l’intelligence artificielle pour la reconnaissance des documents sociaux des travailleurs actifs sur ses chantiers. Rudy Scherer, Chief Digital and Innovation Officer du groupe, nous a expliqué le développement de cette technologie et ses nombreux avantages sur chantier et en dehors.
Le rôle de Rudy Scherer est de coordonner toutes les innovations technologiques entre les différentes filiales du groupe Eiffage Benelux.
« Je détecte les bonnes pratiques en interne, j’essaie de les répandre plus largement dans nos entreprises, et je fais également de la veille technologique et du suivi de projets », indique-t-il.
L’une des innovations chez Eiffage Benelux est ce traitement des documents sociaux des ouvriers des sous-traitants, via une plateforme développée par l’éditeur de logiciels Traxxeo, et qui fonctionne grâce à l’intelligence artificielle.
Déclarations Limosa
Elle a été implémentée pour apporter une solution à une lourde tâche, que nous explique le Chief Digital and Innovation Officer.
« Avant, le conducteur de chantier devait récolter tous les documents des travailleurs des sous-traitants, ensuite les classer et les archiver dans un classeur. Quand je parle de documents, j’évoque les cartes d’identité, les attestations A1, les déclarations Limosa des ouvriers, l’affiliation à une caisse de sécurité sociale…Il devait disposer de tous ces documents papier, une tâche loin d’être évidente et terriblement fastidieuse et chronophage. Ce travail l’empêchait d’investir du temps dans d’autres domaines. » Mais ça, c’était avant.
Vision claire et précise
Depuis quelques années, Eiffage Benelux utilise donc cette solution développée par Traxxeo pour traiter tous ces documents de manière automatique. « Nous avons découvert cette plateforme il y a quatre ans. Entretemps, elle s’est fortement développée, notamment grâce à un projet soutenu par le fonds GreenWin, un pôle de compétitivité wallon. »
Rudy Scherer nous explique le processus.
« Tous nos sous-traitants nous envoient les documents sociaux de leurs travailleurs par emails. De notre côté, nous les « déposons » dans la plateforme de Traxxeo qui reconnaît, elle-même, de quel type de documents il s’agit, ainsi que l’identité, la nationalité et le nom de l’employeur. Certains de nos sous-traitants testent même la possibilité de déposer, eux-mêmes, les documents directement sur la plateforme, dans un espace dédié, et de pouvoir eux aussi bénéficier de cette aide.
Grâce à cette reconnaissance automatique, le logiciel peut vérifier que tous les documents sont bien en ordre. Via une application sur son smartphone, le conducteur a accès à ces données sur le site où il travaille. De cette façon, le management a donc une vision claire et précise de tous les chantiers. Ce n’était pas possible avant. Cette technologie diminue assurément la charge de travail du conducteur de chantier.
Encore plus important, la plateforme est synchronisée avec les données de l’ONSS, ce qui garantit que nous avons bien les documents de tous les ouvriers déclarés sur nos chantiers. Fini donc le ris que d’avoir des ouvriers fraudeurs sur le site, ce qui est une priorité absolue chez Eiffage. »
Mise à jour législative
Autre avantage de la plateforme : Traxxeo la met automatiquement à jour en matière législative. « Ces dernières années, la législation autour du personnel dans le secteur de la construction a fortement évolué, notamment avec toutes les règles liées à la crise du coronavirus.
Pour le chef de chantier, ce n’est pas évident de savoir de quels documents il a besoin pour contrôler que les ouvriers actifs sur son chantier soient en règle. Et bien, la plateforme l’aide car elle a connaissance du type de documents requis, en fonction de la situation du travailleur et de son employeur. La plateforme effectue seule cette analyse. Elle envoie même, toute seule, aux sous-traitants, par mail, la liste des documents manquants par ouvrier.
Le conducteur n’a plus besoin de connaître la législation, ni de faire les rappels. Il peut mettre son énergie ailleurs », explique Rudy Scherer.
La première version de cette innovation technologique, qui repose sur l’intelligence artificielle, remonte à trois ans. « Elle était bien évidemment perfectible et depuis lors, il y a davantage d’IA dans la reconnaissance et la détection des documents. La plateforme devient de plus en plus performante et s’améliore de six mois en six mois. Son développement est très rapide », souligne-t-il. « Actuellement, au sein d’Eiffage Benelux, nous l’utilisons chez Valens, Antwerpse Bouwwerken, Duchêne, De Graeve et prochainement chez Herbosch Kiere, une filiale spécialisée dans les travaux maritimes et sur les quais à Anvers. À terme, l’objectif est de déployer cette reconnaissance dans toutes les filiales du groupe. »
Processus down-top
Vous l’aurez compris, Rudy Scherer ne peut que recommander à ses confrères de contrôler les travailleurs de leurs sous-traitants via ce processus. « Oui, je le conseille clairement. Tous nos conducteurs sont en chantés de travailler de cette façon. Comme déjà dit, ils ont une vision claire des per sonnes sur site. Il faut savoir que ces développements digitaux ont été demandés par le terrain. Ce sont les conducteurs de chantier, eux-mêmes, qui ont demandé de trouver des solutions pour le contrôle du personnel, car la situation devenait ingérable. C’est donc un processus down-top », conclut-il.